« Paysage à la figure absente »

10 janvier / 23 février 2013

Marinette Cueco
Dans son atelier, les différentes fibres accumulées sont en repos, en attente des manipulations futures de la main de l’artiste.
Marinette veille au grain et guette patiemment l’évolution de la matière brute, comme s’il fallait trouver le moment précis  d’intervention qu’elle est la seule à définir. En réalité, son processus de fabrication est une rencontre, une conversation silencieuse et intime entre elle et le monde végétal. « Les herbes décident pour moi« , dit elle.
La logique créatrice de Marinette, ses rapports paradoxaux avec la nature (elle la contrôle tout en étant dirigée par elle), trouvent leur emblème dans une œuvre qui condense tout son parcours : l’herbier. Avec cette mini-nature ou cette nature mise en boîte, l’artiste met à sa portée un échantillonnage qui offre une gamme des couleurs, des textures et des odeurs, comme une carte imaginaire mais vraisemblable.

Itzhak Goldberg

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Mathide Guillemot

Faisant appel aussi bien aux cartes maritimes qu’aux cartes du ciel, l’artiste dessine des paysages en ruine, des images fragiles qui, malgré ou grâce à leur désagrégation, forment un univers qui n’existe nulle part, d’une subjectivité totale. Des réalités éparses, architectures improbables et fragmentaires, une façon de recoller les morceaux, de constituer un atlas recomposé qui ne doit rien à une quelconque logique du terrain. En prenant le chemin des écoliers, les cartes vagabondes de Mathilde Guillemot nous rappellent que la peinture, jamais une reproduction, est toujours une transposition.

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Sebastien Lemporte

L’eau qui écoute.
L’eau, l’élément sensible et composant essentiel de notre environnement, sera au centre de cette installation. Un subtil mélange de son et de lumière transforme en construction plastique la vie intérieure de ce fluide.
Le travail de recherche sonore et plastique de Sébastien Lemporte véhicule l’idée de la matérialisation des mécanismes naturels.

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Vincent Mauger

Paysage ou labyrinthe ? L’œuvre, peu loquace, refuse la narration ou l’anecdote, ne cherche pas à mettre le réel à l’épreuve à
l’aide d’une description minutieuse ou exhaustive. Dénudés de tout artifice, ces blocs géométriques sont comme des vecteurs qui,
par leur taille, par leur situation et leur orientation, établissent une relation directe avec l’espace environnant.
Muets, se repliant sur eux-mêmes, refusant tout « parasitage » psychologique ou métaphorique, ces formes d’une résistance
têtue, sont comme un défi jeté à l’œil de spectateur.  Un univers clos, dénué de toute transparence où l’air ne circule plus.

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Bernadette Tintaud

Ces paysages photographiés témoignent et attestent, d’abord, de la surface du monde terrestre.
Géo-graphie : une écriture, dit-on, à même le sol. La terre est écrite, griffée, labourée, cultivée…
Les labours sont un tissu strié qui enveloppe les sols. Le paysage, au fond, tient tout entier dans une couche de peau.
Mais la peau tremble, moutonne, et il y a dans ce tissu de sol comme une longue vague qui traverse et l’anime, qui tend les surfaces et les replie, les troue et les chiffonne aussi, la vie.
Le paysage souvent bascule, comme emporté par un élan qui le pousse vers l’avant et en travers.
Sous ces apparences figées, dans les choses mêmes, un temps est présent, une germination et une inquiétude, qui brouillent les limites et parfois explosent sourdement… Saturations de lumières, éblouissements de blancs,
noces élémentaires et dispersées du ciel et de la terre.
Il est difficile de ne pas bouger dans un tel monde, il est difficile de ne pas se sentir courir déjà, plonger
vers ces horizons de ciel incertains et nécessaires, vers ces lointains discrètement ouverts et déposés, vers ces blancs…

Jean-Marc Besse Le tremblement des terres, 2002 (extraits de la préface du catalogue Arbres Horizons)

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Stephane Guénier

Mélange des genres : corps végétal, anatomie d’arbres, corps-paysage. Déjà dans un dessin d’octobre 2009 on pouvait lire
à l’envers, tracé au stylo vert : « Stéphane Guénier / moment / d’un corps / dans un paysage, et des mains d’arbre,
des bras de verdure se tendaient. Ici encore, arbres jumeaux comme vus en perspective, au bord d’une route, mais sans la route.
Petites voitures parfois, comme en dessinent les enfants, avec des bouquets d’arbres, des nuages, des gouttes de pluie qui tombent
à l’oblique… Maladresse volontaire, naïveté retrouvée du dessin d’enfant. Fragments de routes en ruban qui ne mènent nulle part,
chemin interrompus, disjoints, lignes discontinues (…)
 »

Evelyne Grossman, « Espaces précaires » (Stéphane Guénier.100 dessins, éd. Liénart)

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Sylvie de Meurville

« Je m’intéresse au paysage, réel ou imaginaire, et à la façon dont les failles, lignes et tracés s’inscrivent dans ses reliefs.
Les plissements de la nature, la croûte terrestre, ressemblent pour moi à une peau qui frémit. C’est paradoxalement dans les formes minérales que je ressens les pulsations de la vie : es courbes des collines, les failles et tensions volcaniques.
Dans mes travaux récents, cette relation s’exprime par de petits paysages réalisés à partir de calques froissés.
Fins et légers, proches de l’envol, ils sont des territoires propices à des promenades mentales, ouverts à l’exploration immobile.
En référence aux sculptures du Bernin, où les drapés deviennent des structures abstraites qui conduisent le regard vers le sujet, je recherche dans les lignes de plis des itinéraires visuels.
L’expression aiguë du papier calque froissé qui sert de base aux sculptures en résine blanche évoque l’acuité d’une intelligence humaine qui perçoit ces formes naturelles.
La finesse du matériau préserve la légèreté et le mouvement d’un épiderme qui s’envole. »

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Cueco

« Pour un artiste, le détail n’est pas une chose négligeable, il reste toujours intentionnel, il est très minutieux, c’est une accroche pour le regard. C’est à cause de cela que paradoxalement le détail est de l’ordre de la fragmentation.
Le fragment reste en quelque sorte un élément beaucoup plus incertain.
Je me suis rendu compte de mon plaisir à faire le détail et du fait que je ne peux pas m’en débarrasser » affirme Cueco.
C’est probablement cette jouissance évoquée par l’artiste qui explique l’attirance que ces paysages-fragments exercent sur le spectateur, car le peintre ne les considère plus comme un motif s’intégrant dans un cadre plus général, mais comme un élément à part, séparé du reste du monde et possédant son caractère propre.

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Fadia Haddad

Paysages ? Sans doute, mais dépouillés de tout caractère illustratif.
Plus que peinte, l’œuvre semble taillée dans la couleur même.
Clairement, l’artiste cherche à structurer le sujet, à rendre visible à travers lui ce qu’on peut appeler l’échafaudage.
Ou plutôt,  l’architecture secrète de la nature, les strates qui la composent. Fadia affirme :
« dans mes paysages il n’y a plus d’être humain et la grandeur de la nature apparaît parce qu’il n’y a plus de parasite ».