Sophie ROCCO

14 janvier / 20 février 2010

 

Sophie Rocco tisse des liens charnels avec sa peinture.  Elle interroge la matière. Elle sonde la texture semblable  pour elle au limon originel d’où émergera la vie. Son désir  profond de réveiller l’assoupi d’avant toute mémoire lui fait  rejeter sa connaissance des êtres et des choses pour lever  le secret de la virginité première, du premier regard, du premier souffle.
Texte 
Lydia Harambourg 
Texte 
D’où surgit cette foule, de quelle prison, de quel enfer ou plutôt de quel « intervalle » entre la vie et la mort naissent ces visages dont on ne saisit pas les regards ? Quel est l’enjeu de ces parties d’échecs ? Et dans quelle cellule se déroule-telle? Je n’ai pu découvrant les toiles de Sophie Rocco ne parle seulement qu’aux yeux. Ou plutôt, par les yeux, elle atteint le sens. Il n’y a pas, je crois, de grande peinture qui n’interroge, qui ne fasse trembler celui qui la regarde. Mais pour que cela se produise, encore faut-il que le peintre ait réussi à composer un univers qui attire, enveloppe, étreint, absorbe. Le regard que l’on porte sur le travail de Sophie Rocco nous emporte ainsi parce qu’il fait surgir de nouvelles perspectives qui ne sont pas qu’affaire de « composition graphique » (profondeur, architecture, mouvement, croisement de plans : tout cela est nouveau, fort, personnel) ; mais, par l’emploi d’un glissement de couleurs fortes, la création d’une « perspective » philosophique. Car cette peinture est fortement pensée. Elle exprime une vision et une douleur au monde. Le tremble, l’imprécis, l’indécis, l’absence d’yeux dans les visages, suggèrent bien un univers d’angoisse, qui doit autant à l’âme – l’inconscient – qu’à la réalité : car on pense aussi bien à des phantasmes, des obsessions intimes, qu’à un univers concentrationnaire. Mais ce qui me paraît marquer cette série de toiles de Sophie Rocco, c’est le silence accablé des êtres qu’elle peint ; leur souffrance muette que tout leur corps exprime et que la place qu’ils occupent dans les couleurs rend presque insoutenable. Et cependant, on ne peut détourner les yeux. Ils sont pris par la toile, comme si Sophie Rocco avait su exprimer ce que nous sommes, ce que nous craignons, et comme si, chacune de ses oeuvres était notre miroir.
Texte 
Max Gallo